*SEMENCES IRRADIEES ET IRRADIATION DES ALIMENTS*

Publié le par la gauche alternative dans l'Oise



Biocontact, n°188, février 2009

L’irradiation des aliments vient s’ajouter à une longue liste de
technologies destinées à la conservation des aliments : appertisation
(stérilisation par la chaleur dans des contenants hermétiques),
congélation, surgélation, pasteurisation et traitement UHT…. Ici, un
rayonnement ionisant inférieur à 10 kGray (dose absorbée moyenne) est
projeté sur les aliments afin d’éradiquer germes, champignons, œufs
d’insectes et parasites. Néanmoins, cette dose ne permet pas d’éliminer
toutes les bactéries, ni les toxines, ni les virus, ni le prion. Les
aliments n’en sortent pas radioactifs, mais de nouvelles molécules
éventuellement génotoxiques, cytotoxiques et cancérigènes sont générées.
De plus, la toxicité de ces produits de radiolyse n’a été que très peu
étudiée, au mépris du principe de précaution.

Les produits principalement concernés en France sont les épices, les
plantes aromatiques, les oignons, les aux, les légumes et fruits secs,
germes de céréales, gomme arabique, farine de riz, volaille, cuisses de
grenouilles congelées, sang séché et plasma, crevettes, caséïne,
caséïnates, ovalbumine…

La finalité de cette technologie est en fait de prolonger
artificiellement la durée de conservation des denrées en vue de leur
exportation des pays du Sud vers les pays occidentaux, gros
consommateurs. Cette politique agro-industrielle, marquée par
l’hygiénisme nord américain, entérine de fait le commerce d’une
alimentation mondialisée et de plus en plus aseptisée.

Mais les partisans des technologies de l’atome vont encore plus loin
dans leur volonté de contrôler la nature et l’évolution. Pour répondre à
la crise alimentaire, l’Agence internationale pour l’énergie atomique
(AIEA), en collaboration avec l’Organisation des Nations Unies pour
l’alimentation et l’agriculture (FAO) propose de modifier le patrimoine
génétique des cultures de produits alimentaires par la technique ditede
« mutation incitée par irradiation ». Défendant ardemment depuis 50 ans
les « bienfaits » de l’atome, l’AIEA s’est employée à bombarder des
semences de riz, de blé…, par des radiations ou des toxiques chimiques,
pour développer des variétés qui seraient plus résistantes aux aléas
climatiques. Affirmant que cette technique est « propre et saine »
(AIEA, agence Reuters, Vienne 02/12/2008) car les semences ne sont pas
radioactives, et qu’en comparaison avec la technique de la transgénèse
(les Organismes Génétiquement Modifiés), elles ne reçoivent pas de gène
étranger, ces chercheurs modifient en fait de manière irréversible et
totalement aléatoire le génome de l’espèce irradiée. Une telle variété
irradiée de plante est donc, exactement comme un Organisme génétiquement
modifié, une chimère génétique, dont les conséquences éventuelles sur la
santé humaine (allergies, cancerogénèse, mutations du génome humain…)
sont totalement inconnues.

Les mutations existent dans la nature : soumises à un stress climatique
par exemple, les plantes adaptent leur génome, mutent ou expriment
d’autres gènes qui étaient en sommeil. Dans le cas de l’irradiation, ces
mutations sont provoquées au petit bonheur la chance, sur un intervalle
de temps infiniment plus court, comme pour les OGM. Affirmer que « cette
mutation induite ne fait qu’accélérer le processus naturel de
modifications spontanées qui surviennent dans les plantes » (AIEA,
agence Reuters, Vienne 02/12/2008) fait totalement abstraction du fait
que nous savons dans la réalité que peu de choses sur ce processus
naturel. En effet, pour prendre l’exemple du génome humain, seuls *2 %*
de notre patrimoine génétique sont codants pour la synthèse des
protéines, alors que nous ne connaissons pas à ce jour le rôle des 98
autres %, constitués de séquences répétitives. La connaissance dugénome
n’en est qu’à ses balbutiements. Autant dire que nous jouons, une fois
de plus, aux apprentis sorciers.

La FAO, associée à ce projet avec l’AIEA depuis la création de leur
Division mixte en 1964, indique que son but est désintéressé et ne vise
qu’à développer un commerce plus équitable, afin de venir en aideaux
paysans les plus démunis pour leur permettre de vivre décemment (Agence
Reuters : « La science nucléaire au service de la sécurité alimentaire :
l’AIEA dit que les semences irradiées pourraient atténuer les effets de
la crise alimentaire », Vienne, 2 décembre 2008).

Mais, en réalité, le droit de tous à la terre, à une alimentation
suffisante et à la santé, ne passera-t-il pas plus simplement par un
partage équitable des ressources et des richesses ?


Thierry FOLLIARD* (Naturopathe et ingénieur énergie-environnement)
co-animateur au Collectif Français contre l’Irradiation des Aliments

Publié dans réflexion - débat

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